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mercredi 19 janvier 2011

Janvier Noir

Le 20 janvier est un deuil national en Azerbaïdjan. Il est de ce fait férié. On commémorera demain les évènements qui ce sont déroulés il y a 21 ans, dans la nuit du 19 au 20 janvier 1990, lorsque 26.000 militaires soviétiques envahirent Bakou pour écraser le Front Populaire Azerbaïdjanais. Les bilans varient d'une source à l'autre, l'officiel faisant état de 137 morts. Cet évènement s'inscrit dans le processus d'émancipation de l'Azerbaïdjan de la tutelle soviétique.


Le casus belli? Une agitation interne et des tensions ethniques attisées par le Front populaire. A l'époque, des mouvements indépendantistes naissant agitaient le sud du pays. De plus, la République socialiste soviétique d'Arménie venait de décider (le 9 janvier) l'inclusion de l'Oblast du Haut-Karabakh dans son budget, ainsi que l'autorisation pour les habitants de la région de voter pour les élections arméniennes, ce qui enfreignait clairement la loi soviétique. A l'époque, outre les velléités d'indépendance de l'Azerbaïdjan, exacerbées par le comportement du pouvoir central à l'égard de l'Arménie, plusieurs pogromes anti-arméniens eurent lieu dans le pays, notamment à Sumgait le 12 janvier, où 90 arméniens perdirent la vie. On estime que ce sont près de 300.000 arméniens qui quittèrent Bakou suite à ces évènements. Dans la foulée, l'état d'urgence fut déclaré, l'Armée Rouge et le KGB pénétrèrent dans la capitale pour rétablir l'ordre, faisant près d'un milliers de victimes (aux morts, il faut ajouter au moins 800 blessés). Le 22 janvier, les Bakinois enterrèrent leurs morts et une grève générale paralysa la République pendant 40 jours. L'état d'urgence ne sera levé que 4 mois plus tard.


Le 18 octobre 1991, l'Azerbaïdjan déclara son indépendance, qui fut confirmée par un référendum en décembre de la même année, juste avant la dissolution officielle de l'URSS. Gorbatchev s'excusera en qualifiant la déclaration de l'état d'urgence à Bakou comme la plus grande erreur de sa carrière politique. Une loi de 1994 établi le 20 janvier comme le jour de deuil national. Les victimes des évènements possèdent, par décret présidentiel, le titre de "Martyres du 20 janvier". Ils sont enterrés dans l'"Allée des Martyres" sur les hauteurs de Bakou, un mémorial rassemblant entre autre les morts des guerres du Karabakh.

dimanche 5 décembre 2010

Ateşgah, le temple de feu

Plusieurs siècles ont passé depuis que le territoire actuel de l'Azerbaïdjan ne fait plus partie de l'Empire Perse et peu nombreuses sont les traces qui restent du temps jadis où le Zoroastrisme était la religion majoritaire sur ces terres.


Mais depuis le 5 ou 6ème siècle avant notre ère, les zoroastriens vénèrent ce feu naturel sorti de la terre. Ce n'est pas le seul endroit d'Azerbaïdjan où l'on peut observer un tel phénomène, ni même une chose unique sur la péninsule d'Abchéron, mais le feu à cet endroit précis a été mis en valeur au XVIIIème siècle par des adorateurs hindouistes de Shiva. Le caravansérail pentagonal qui entoure le temple de feu est donc relativement récent si on le compare à l'histoire du site dans son ensemble. Les hindouistes pratiquaient encore au début du siècle dernier des pratiques ascétiques extrêmes comme, par exemple, le fait de s'allonger sur du charbon ardent. L'histoire du lieu est racontée dans les bâtiments du caravansérail, garnis de mannequins assez inquiétants.


Pour démystifier un peu les choses, il est important de préciser que le feu n'est plus, depuis plusieurs années, d'origine naturelle. Remercions donc le service de gaz urbain de Bakou de nous permettre d'avoir une certaine idée de ce que pouvait être le lieu il y a 200 ans. D'autres endroits autour de Bakou brûlent encore de manière naturelle, mais aucun n'a été mis en valeur comme le temple de feu de Suraxani (à 5km du centre-ville de Bakou, au beau milieu des champs de pétrole).

jeudi 25 novembre 2010

Record du monde

Un peu en panne d'inspiration malgré la volonté d'écrire quelque chose ce soir, je suis tombé dans google actualité sur un communiqué du CNRS au sujet du pays dans lequel je vis. (http://www2.cnrs.fr/presse/communique/2022.htm).


L'Azerbaïdjan (qui l'eut cru?) abrite le plus vieux gisement de sel exploité par l'homme (exploitation qui a cessé depuis bien longtemps). Evidemment la nouvelle ne va bouleverser aucun de mes lecteurs mais elle permet de souligner, au passage, que la région possède une forme de civilisation développée depuis environ 7000 ans. Cette découverte efface des tablettes l'ancien (je n'ai, ceci-dit, pas réussi à trouver la région), qui n'était que de 5000 ans.
La mine de sel où ont étés retrouvés quelques outils et céramiques se trouve dans l’ex-clave du Nakhitchevan, non loin de la Turquie, l'Iran et l'Arménie, plus exactement à Duzdağ.

Si cette nouvelle se retrouve sur le site du CNRS, c'est que les fouilles du lieu, en pleine vallée de l'Araxe (dont je viens, peut-être comme vous, de faire la découverte), ont étés effectués avec le soutien et l'appui du Ministère des Affaires Etrangères français.

samedi 23 octobre 2010

La Tour de la Vierge

Difficile de tenir le rythme sur ce blog... Mais intéressant.


J'ai décidé aujourd'hui d'aborder un sujet assez facile, puisque les informations sont nombreuses. Cette tour située aux confins de la vieille ville est LE symbole absolu de la ville de Bakou (loin devant le pétrole et le président à mon sens).
Son nom azéri (Qız Qalası) se traduit en général par "tour de la jeune fille" ou "tour de la vierge", probablement en raison de son inviolabilité, au sens militaire du terme. Ce nom a pourtant donné lieu à une légende tenace. 
Un notable dirigeant local aurait décidé d'épouser sa propre fille dont il était amoureux. Cette dernière, tiraillée entre le dégoût de l'inceste et la désobéissance à son père, demanda à son prétendant de lui construire une tour afin qu'elle puisse d'abord toiser l'immensité de son domaine. Le père accepta et fit bâtir cette tour, de laquelle se jeta la jeune fille pour mettre fin à l'histoire.

La tour du XIIème siècle mesure 29 mètres de haut, répartis entre 8 étages à peu près vierges (sans jeu de mot). Quelques photos et boutiques occupent les lieux et le toit est accessible. La vue sur la vieille ville et la mer Caspienne est imprenable.

samedi 16 octobre 2010

L'Azerbaïdjan: 40.000 ans d'histoire

A une soixantaine de kilomètres de Bakou, en bord de mer Caspienne, se trouve le lieu de peuplement le plus ancien connu en Azerbaïdjan, qui est protégé depuis 2007 par l'UNESCO (ou ONUESC pour faire plus français): La réserve de Gobustan.


 Une partie seulement de la réserve est ouverte au public: il s'agit d'une étonnante colline couverte d’impressionnants rochers que l'on ne retrouve pas aux alentours (Boyukdash). Ces rochers présentent environ 6000 gravures dont certaines auraient environ 40.000 ans (http://whc.unesco.org/fr/list/1076) et témoignent du mode de vie de l'époque: scènes de chasse, de pêche et d'élevage.
Les premiers occupants permanents des lieux se seraient installés ici suite à un tremblement de terre durent trouver de nouveaux abris dans les terres.



Le site a été très étudié par un ethnologue norvégien: Thor Heyerdahl, qui émet notamment l'hypothèse que les Vikings puissent être originaires d'Azerbaïdjan, en se basant sur des faits historiques: ressemblance des mythologies, fuite des troupes romaines au 1er siècle (les romains étaient effectivement présents à cette époque, d'ailleurs un rocher gravé en romain se trouve à l’entrée de la réserve)...


mardi 5 octobre 2010

Parlez-vous Azéri?



Une grande partie de l'identité culturelle azérie peut se définir à travers sa langue: l'Azerbaïdjanais (ou Azéri-turc). Vous l'aurez compris, il s'agit d'une langue turcique extrêmement proche du turc de Turquie (travaillant avec des Turcs et des Azéris, je me rends compte chaque jour de l'inter-compréhension). Le Gagaouze (Moldavie), le Tatar de Crimée et le Turkmène sont également très proches.

Cette langue est parlée au-delà des frontière du pays et notamment en Iran, où l'on dénombre davantage de locuteur de l'Azéri (environ 15 millions) que d'habitants en Azerbaïdjan (environ 8 millions, cf. publication précédente). On compte en outre des minorités "azérophones" en Turquie, en Géorgie, en Russie et dans le Kurdistan Irakien (où la langue possède un statut officiel mais est décrite comme turkmène).

Les débuts de la tradition littéraire Azerbaïdjanaise en langue turcique sont largement liés au nom de Mehmed bin Suleyman Füzuli (1ère moitié du XVIème siècle), qui a notamment traduit des œuvres de Nizami Gəncəvi (voir ci-dessous), le grand dramaturge azéri  de la fin du XIIème siècle, d'expression persane.


Səməd Vurğun (cf. photo du début d'article) est la grande figure de la littérature azérie contemporaine (première moitié du XXème siècle). Je vis d'ailleurs à deux pas du Théâtre dramatique Russe, qui porte son nom.

L'alphabet utilisé en Azerbaïdjan pour la langue fut longtemps l'arabe-persan (qui reste celui des azéris d'Iran), abandonné au début des années 1920 au profit d'un alphabet latin légèrement différent ce celui en vigueur aujourd'hui. A partir de 1939 et jusqu'en 1991, le cyrillique est l'alphabet officiel. Aujourd'hui, l'alphabet est à nouveau latin, avec quelques adaptations, telles que le "ə", le "ı" (i sans le point), le "ğ", le "ş", le "ç", le "ü" et le "ö". Des adaptations similaires existaient par rapport au cyrillique russe (ә, ҹ, ҝ, ғ, ө, ү, ј).
Certaines lettres ont une prononciation différente de leur équivalent français (le nom de la ville de Qobustan s'écrit et se prononce par exemple Gobustan, "c" se prononce "j"...).

Si le russe reste largement pratiqué, compris et étudié ici, l'Azerbaïdjanais est la seule et unique langue officielle (ce qui n'est pas le cas au Kazakhstan, en Biélorussie et au Kirghizstan, où le russe est, au côté de la langue "nationale", également officiel).
Contrairement à ce qui se passe en Lettonie ou en Estonie, la langue russe n'a pas mauvaise presse, bien au contraire, ce qui est sans doute lié au poids de l'histoire et à la faible importance de la communauté russe dans le pays.